Céramiques du XXe siècle




 
En une centaine d’années, l’art de la céramique s’est complètement transformé. Dès le milieu du XIXe s., le matériau prend une nouvelle ampleur. Après la contribution majeure des artistes de l’Art Nouveau au début du XXe siècle, la céramique a pu profiter des apports des courants artistiques qui ont suivi. La vente Côté XXe du 6 et 7 avril 2023, organisée par la maison Ader, donne un aperçu assez complet de ces évolutions techniques et stylistiques, en présentant aux acheteurs des pièces de céramistes de renom.




La céramique Art Déco

L’art de la céramique de l’entre-deux-guerres suit le triomphe du courant Art Déco. À l’image des créations mobilières, la céramique va chercher une simplification et une géométrisation des formes, un aspect luxueux plus prononcé, et des inspirations dans le monde extra-européen.
 
Le lot 137 de la vente, un vase Peau de serpent réalisé vers 1930 par René Buthaud, qui a signé sous son pseudonyme Jean Doris, rend bien compte de cette évolution. L’artiste, pour ce décor, troque les rinceaux de l’Art Nouveau pour une plus grande géométrisation des tracés, les effets de flammé pour des effets de craquelure, et ajoute des lignes d’or afin de rehausser le caractère précieux de la pièce. À la même période, on voit apparaître sur les meubles et objets des peaux de serpent, qui sont à la fois recherchées et exotiques. Les craquelures visibles dans la couverte font le même effet visuel que ces peaux, d’où le titre donné par René Buthaud à son œuvre.
 
L’utilisation d’un pseudonyme a pu être interprétée par quelques spécialistes comme une manière pour l’artiste de distinguer une certaine production stylistique plus géométrique, mais d’autres la voient d’une façon plus pragmatique : ce pseudonyme aurait pu être réservé par Buthaud aux pièces qu’il destinait à l’exportation, ou encore pouvait-il servir à garantir à l’artiste plus d’espaces d’exposition aux salons.
 
Cette œuvre reprend donc les recherches des artistes de la période Art Déco. La palette de couleur assez sobre très particulière de cette pièce, renvoie également à l’esthétique Art Déco. La forme sobre reste fonctionnelle, comme plusieurs des autres créations céramiques de René Buthaud. Le vase présenté à la vente est donc inscrit dans le courant artistique de sa période et est un bel exemple des productions de cet artiste prolifique.



137 - RENÉ BUTHAUD (1886-1986) ALIAS JEAN DORIS
Peau de serpent, circa 1930
Important vase piriforme au col en débordement. 
Épreuve en céramique émaillée, ivoire et beige, craquelée, laissant apparaître le fond terre teinté brun et décrivant un décor géométrique. Le talon et une partie du décor à l’or au four. Signé J. DORIS sous la base. 
H. 33cm
Estimation : 3 000-5 000€





La céramique des années 1950
 
Après-guerre, sous l’impulsion notable de Pablo Picasso qui s’installe alors à Vallauris, la production de céramique a connu une transformation fondamentale par l’approche nouvelle qu’ont eu les artistes du matériau, doublée d’une réorientation des lieux de production. De grands créateurs ont élaboré des œuvres très personnelles, aux couleurs souvent éclatantes et aux formes nouvelles.
 
De nombreux lots de la vente s’inscrivent dans cette esthétique renouvelée : les œuvres de Georges Jouve et de son atelier (lots 294 à 296), de Jacques et Dani Ruelland (lots 297 à 302), de Pol Chambost (lots 304 à 309)… Aussi plusieurs œuvres de Jacques Blin sont proposées à la vente, céramiste qui a su développer un style qui lui était propre : sur des formes assez brutes, aux couleurs changeantes par les jeux de patines, de fins dessins sont gravés, qui développent tout un vocabulaire artistique figuratif, souvent habité d’une symbolique profonde. Il travaillait sur ces motifs élaborés en collaboration avec le peintre Jean Rustin. Les lots 310 à 314 donnent un bon aperçu du travail de l’artiste, toujours dans ce même style si particulier.
 
De la même manière, Roger Capron arrive aussi à affirmer sa vision artistique dans ses productions, dans son atelier à Vallauris. Vallauris, sous l’impulsion majeure de Picasso, est devenu un centre important de production céramique à cette période. Capron s’éloigne néanmoins de l’influence directe de Picasso pour produire des œuvres qui lui sont propres, dans le style et la facture : beaucoup de pièces de forme moulées, puis décorées à la main. Les lots 316 à 320 témoignent de la diversité de la production de son atelier, des masques africains aux sculptures cuites à la façon raku.

Cet art céramique, si varié, pose à cette période les bases de son développement ultérieur tout au long de la deuxième moitié du XXe s.


314- JACQUES BLIN (1920-1995)
Les Shadoks
Vase à renflement supérieur et à une minuscule anse détachée. Épreuve en céramique émaillée orange, essuyée et patinée noir ; le décor titre gravé sous couverte. Signé J. BLIN au revers. 
H. 27cm
Estimation : 500-800€





320- ROGER CAPRON (1922-2006)
Jeune femme aux manches bouffantes
Importante sculpture. Épreuve en céramique émaillée polychrome ; cuisson raku. Terrasse en métal. Signée CAPRON au dos de la sculpture. 
H. 73,5cm
Estimation : 4 000-6 000€





Céramique à partir des années 1980 : l’exemple de Claire Debril
 
Une importante réunion d’œuvres de Claire Debril figurent dans la vente du 7 avril. Les lots 386 à 402 sont tous de cette artiste, ce qui nous permet d’avoir un aperçu assez complet de la production de cette céramiste majeure de l’après-guerre.
 
Ses pièces, aux formes souvent identifiables et très représentatives des créations de l’artiste se voient pourvues de bordures ou d’anses mouvementées, donnant à voir la matérialité de la terre qui les composent. Les couleurs sont plutôt neutres, s’approchant des couleurs de la terre d’origine (ocre, noir, brun…), reflétant la parfaite maîtrise des émaux et d’une palette chromatique apparemment réduite, par des jeux de bichromies, des effets de feu et de lustre, des mouchetages d’émail, etc. On sent dans ces pièces une tension entre l’aspect brut et libre du matériau, et l’intervention rigoureuse de l’artiste, faisant de ces créations bien plus des œuvres d’art que des objets fonctionnels et utilitaires.
 
La vente est une bonne occasion pour (re)découvrir cette céramiste de grand talent aux pièces sobres et élaborées, décédée en 2021 après une longue et fructueuse carrière.



399- CLAIRE DEBRIL (1927-2021)
Évocation d’un corps, œuvre exposée à la Galerie Mai, Paris, novembre-décembre 1985 
Important vase anthropomorphe présentant enfoncements et scarifications. Épreuve en céramique émaillée noir nuancé de brun sombre ; certaines zones lustrées. Monogrammé C. D. sous la base. 
H. 50,5 cm
Estimation : 2 000-3 000€







VENTE CÔTÉ XXe


PARTIE 1 : Art nouveau – Art déco – Années 1930-40 – Documentation - Lots 1 à 293
https://www.ader-paris.fr/catalogue/138418-cote-xxe-partie-1-art-nouveau-art-deco-annees-193040-documentation-lots-1-a-293

Jeudi 6 avril 2023 à 14:00
Salle 1-7 - Hôtel Drouot , 9, rue Drouot 75009 Paris


PARTIE 2 : ANNÉES 1950 – ANNÉES 1960-70 – DESIGN - LOTS 294 À 584
https://www.ader-paris.fr/vente/136660-cote-xxe-partie-2-annees-1950-annees-196070-design-lots-294-a-584

vendredi 7 avril 2023 14:00
Salle 1-7 - Hôtel Drouot , 9, rue Drouot 75009 Paris



Exposition publique :

À Drouot, salles 1 & 7
Mercredi 5 avril de 11 h à 18 h
Jeudi 6 avril de 11 h à 12 h



Responsables de la vente :

Xavier DOMINIQUE
xavier.dominique@ader-paris.fr

Anne-Lise PERNIN
alpernin@ader-paris.fr



CABINET D’EXPERTISE EMMANUEL EYRAUD

Emmanuel EYRAUD
Membre de la Compagnie Nationale des Experts

Carole FEREZ
Hélène PIROT
Valentin SCHNEIDER

27, rue Saint-Dominique 75007 PARIS
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