La maison Ader propose à la vente le vendredi 21 avril une collection particulière parisienne impressionnante, en partie constituée de céramiques de Chine. Les pièces sont toutes d’une grande qualité et d’une grande variété : de l’époque Han au règne de Kangxi, de nombreux styles sont regroupés et présentés dès le jeudi 20 avril dans la salle 2 de Drouot. En attendant, découvrez quelques pièces phares dans cet article.

La période de la dynastie Song (960-1279), est considérée comme un âge d’or de la culture chinoise. Le confucianisme influence la cour et le bon goût est défini par les mandarins, des fonctionnaires lettrés qui gagnent en importance politique et culturelle. Dans cet esprit, les céramiques de la période suivent également les principes du confucianisme, et on apprécie les formes simples, moulées, parfois incisées. On donne beaucoup d’importance aux couvertes et aux effets du feu. Aujourd’hui, les céramiques Song sont recherchées par les collectionneurs. C’est l’époque de production majeure des fameux céladons, mais également des Jun, un style de céramique auquel appartiennent plusieurs pièces de la vente du 21 avril.

Ce qu’on appelle le type Junyao est un style attribué aux fours du même nom, qui a été très apprécié à la cour Song pour ses reflets bleutés tout particulièrement travaillés grâce à une couverte assez épaisse réalisée à base d’oxyde de cuivre. Le lot 84 en est un exemple remarquable : sa couverte bleu lavande, qui tire vers le chamois sur la descente du marli, est d’une grande pureté et les effets de matière dus à la viscosité de la couverte sont assez visibles et étaient probablement très appréciés.

La période de transition des Ming aux Qing s’étend de 1618 à 1683. Elle consiste en la conquête de la Chine par les Mandchous et est marquée par une assez grande instabilité. De ce fait, la production officielle de céramique placée sous patronage impérial est assez réduite et la demande de céramiques se réoriente notamment vers les lettrés, les souverains régionaux et le marché étranger.

Les décors évoluent alors, de même que le style. Le décor de bleu de cobalt sur un fond blanc immaculé de porcelaine, que l'on trouve dans les fameuses pièces bleu-blanc, est de plus en plus mobilisé et occupe souvent à cette période une grande partie de la pièce. Destinées à un public d’érudits, ces pièces sont couvertes de scènes imagées, s’inspirant de personnages, paysages, scènes de la littérature d'une dimension souvent romantique.

C’est notamment le cas de la pièce 102 de la vente du 21 avril, probablement destinée à un de ces lettrés. Elle présente en effet une femme sous un saule, accueillant un militaire flanqué d’hommes de sa garde tenant des bannières. Elle s’inscrit donc bien dans ce goût littéraire, rappelant également le contexte belliqueux de la période, et les paysages peuvent rappeler quelques peintures de lettrés de la période. Le décor de bleu sur blanc est donc assez fréquent dans cette période et il est ici associé à un décor de frise incisé, ce qui peut rappeler les décors Ming. Enfin, la forme Bitong, de pot à pinceau, était aussi initialement destinée aux lettrés (pour la calligraphie ou la peinture).

Le lot 106 de la vente est un vase de forme Meiping, réalisé en porcelaine blanche émaillée en bleu sous couverte, du XVIIIe s., avec un décor qui s’inspire du style des Ming. Ce vase témoigne de l’intérêt rétrospectif de la dynastie Qing sur les dynasties la précédant. Plusieurs souverains Ming étaient en effet de grands collectionneurs, et ont développé un réel intérêt pour les pièces antiques et les productions plus anciennes de la Chine. Certaines demeures comme le Palais d’Été étaient remplies de leurs collections.

La forme de ce vase rappelle des vases initialement destinés à la consommation d’alcool. Cette forme a été détournée par les lettrés, qui ont fait de ces vases des pièces de collection servant notamment à disposer une branche de prunus, symbole de renouveau, dans le goulot étroit. De même, la manière de réaliser le décor en laissant de petits points de bleu plus sombres, rappelle la technique de production de bleu et blanc sous les Ming (« heaped and piled »). Enfin, le décor même de branchages couverts de fruits (grenades, pêches, kakis, litchis…) est un motif particulièrement apprécié par la dynastie précédente.

Cette pièce est donc intéressante par cette dimension rétrospective, qui témoigne du goût de cette période particulière d’une cour mandchoue cultivée à la tête de l’empire chinois.

Retrouvez cette collection au complet lors de la vente, le vendredi 21 avril à Drouot.