PORTRAIT DE GREUZE PAR LUI-MÊME
La vente de tableaux anciens du mardi 25 avril qui aura lieu en salle 1 à Drouot à 14 heures présente un autoportrait de Greuze. Il est à replacer dans une production plus large de l’artiste, mais aussi dans un contexte de développement sans précédent de l’art du portrait au XVIIIe s.
Expression et ressemblance
L’Académie de peinture et de sculpture est une institution artistique majeure du XVIIIe s. Plusieurs discours y sont prononcés, qui théorisent pour les années à venir la peinture comme la sculpture. Un homme influent, Roger de Piles, y expose ses idées sur le portrait dans son essai « Sur la manière de faire les portraits » publié en 1708. À cette période, le mot « autoportrait » ne semble pas encore exister et les artistes se réfèrent donc à l’art du portrait pour établir un portrait d’eux-mêmes. Et une règle d’or du portrait, exposée par Roger de Piles, est de ne pas limiter la vraisemblance à l’apparence extérieure mais savoir aussi capturer le monde intérieur du portraituré «pour que le portrait de leur corps soit aussi celui de leur esprit».
Greuze saisit bien cette subtilité en dépassant dans son autoportrait une simple ressemblance à sa personne. Il se peint, en action, le bras levé suspendu dans son geste et le regard inquisiteur. Son expression reste assez sereine, ce qui peut traduire son équilibre intérieur au moment où il pratique son art. Ce sentiment d’apaisement est d’autant plus marquant que dans beaucoup de ses autres œuvres peintes, de fortes passions se lisent sur le visage desprotagonistes.
Un autoportrait parmi d’autres
Greuze adopte souvent cet air de sérénité quand il s’agit de la représentation de sa propre personne. On peut en effet l’affirmer puisque d’autres autoportraits de sa main existent, dont plusieurs sont conservés dans les collections publiques. Notre autoportrait semble avoir été réalisé alors que Greuze est assez jeune et est aussi intéressant car l’artiste se représente vêtu d’un « négligé », accoutrement favori des artistes.
Greuze se montre ainsi en tenue de travail, absorbé dans sa réalisation. Plus tard, il s’est représenté plus installé puisque sa réputation était faite. L’artiste connaît en effet un certain succès avec ses compositions de « Peinture de genre », comme L’Accordée de village (1761, musée du Louvre) ou encore La Piété filiale (1763, musée de l’Ermitage), notamment célébrées par Diderot qui est un grand amateur de Greuze. Il s’est aussi fait un nom dans le domaine du portrait et s’exerce donc avec aisance à l’autoportrait.
Une touche particulière
Greuze choisit ici une touche assez empâtée qui permet d’accrocher la lumière. Le visage notamment laisse apparaître quelques coups de pinceau venant souligner la malléabilité de la chair, et de même pour la veste bleue, les touches plus claires rendent avec brio le mouvement du tissu. Le tout permet des effets de lumière particulièrement bien étudiés. L’artiste choisit un fond totalement dépouillé, qui lui permet par un éclaircissement de faire ressortir le centre de la composition. Le jabot blanc, ainsi que le contraste du rouge des joues et du bleu de la veste font ressortir clairement la tête et donc l’expression de Greuze.
La lumière est ainsi particulièrement travaillée, comme souvent dans ses compositions assez théâtralisées, ici par l’utilisation de cette touche plus épaisse que dans d’autres œuvres postérieures, parfois plus lisses pour une meilleure lisibilité.
Pour mieux apprécier ce mouvement de la touche, cette attention à la figure et notamment au regard, retrouvez l’autoportrait et beaucoup d’autres tableaux le 25 avril à Drouot !
Pour mieux apprécier ce mouvement de la touche, cette attention à la figure et notamment au regard, retrouvez l’autoportrait et beaucoup d’autres tableaux le 25 avril à Drouot !
Lot 53 - Jean-Baptiste GREUZE (Tournus 1725 – Paris 1805)
Autoportrait
Toile
61,3 x 50,1cm
Porte des étiquettes anciennes au revers du cadre : l’étiquette de la vente de 1882 et « Portraits du Siècle /145 »
(Restaurations anciennes et petits manques en bas à droite)
Estimations : 40 000 – 60 000€
TABLEAUX ANCIENS
https://www.ader-paris.fr/catalogue/129812-tableaux-anciens
VENTE
Mardi 25 avril 2023 14h00
Hôtel Drouot, salle 1
EXPOSITION PUBLIQUE
À Drouot, salle 1
Lundi 24 avril de 11 h à 18 h
Mardi 25 avril de 11h à 12h
EXPERT
Cabinet Turquin
69, rue Sainte Anne
75002 paris
Tél. : 01 47 03 48 78
RESPONSABLE DE LA VENTE
Clémentine DUBOIS
cdubois@ader-paris.fr
Tél. : 01 78 91 10 06