“ Il y a beaucoup de choses qu'on ne peut pas dire sur l'art parce que pour moi, l'art, c'est la vie. Moi je n’ai que la vie.”
La collection de Gérard Depardieu sera présentée aux enchères par la maison Ader les mardi 26 et mercredi 27 septembre 2023. Sculptures, peintures et dessins : près de 250 œuvres choisies, essentiellement réalisées par les plus grands artistes du XXème siècle, seront dispersées à l’hôtel Drouot. Gérard Depardieu a rassemblé des pièces remarquables de Rodin, Duchamp, Calder, Miro, Michaux, Richier et Leroy, qui côtoient des noms plus confidentiels. L’intensité de leur matière, la puissance de leur ligne et la force de leur couleur reflètent la personnalité du comédien. Cet ensemble a été composé au gré de ses rôles, de ses voyages et de ses rencontres marquantes.
« Il n'y a rien d'intellectuel et surtout rien de de spéculatif. Il y a simplement une chose qui te touche, des bleus, une forme, des choses qui te rappellent des peintures. »
C’est une collection en perpétuelle évolution qui a été composée au fil des rencontres et des films, des périodes et des événements de sa vie. « J’étais en pleine lecture de Matisse et j’avais besoin de couleurs, de ça » analyse-t-il en évoquant une œuvre très colorée d’André Masson parmi les six qui figurent au catalogue. « Les tableaux viennent par eux-mêmes » : Gérard Depardieu, sans aucune intention spéculative, achète ce qu’il aime, et plus particulièrement en fonction de « la facilité à vivre avec ». Il ne s’attache pas exclusivement à un style ou à un mouvement, mais assouvit avec instinct un enthousiasme gratuit et soudain pour un artiste. Cette collection puissante et forte est disposée librement. Les tableaux posés au sol, les sculptures en mouvement recréent comme un atelier d’artiste. Le foisonnement des œuvres répond à la violence des émotions et des impressions qu’elles suscitent : «ça te plaît, ça te prend dans le ventre».
“J'achète toujours des choses qui me touchent”
Matière, couleur, geste et trait : la puissance des œuvres
« La matière, oui. Sans matière, tu ne fais rien. Pas seulement dans la sculpture, mais aussi dans la peinture. Dans la peinture, puis dans la vie. »
La matière, irrégulière, difforme, âpre, occupe une place centrale dans la collection. Qu’il s’agisse des sculptures, comme les trois pièces de Rodin acquises après avoir incarné le sculpteur, ou des toiles, Depardieu recherche des œuvres où la matière s’impose : « Leroy, c’est même plus de la peinture, c’est de la matière ». Avec un ensemble exceptionnel de 23 toiles, 7 eaux fortes et son unique sculpture, Eugène Leroy est particulièrement présent ici. Germaine Richier, dont la rétrospective se tient au centre Pompidou jusqu’au 12 juin 2023 puis à Montpellier jusqu’en novembre 2023, est aussi présente en force, avec une pièce unique, agrandissement de L’Homme qui marche, estimée 500 000 / 800 000 €.
Auguste RODIN (1840-1917) Paolo et Francesca, [avant 1886] Épreuve en bronze à patine noire. Signée et numérotée 7/8. Fonte Musée Rodin 1982. 29.3 x 60.7 x 28.4 cm 60 000 / 80 000 €
La couleur fascine depuis toujours Depardieu, par sa puissance explosive. Onze œuvres du mouvement Cobra sont proposées dans cette vente, où graphisme et chromatisme se fondent dans une abstraction quasi convulsive, comme dans la Composition d’Asger Jorn ou les Deux têtes de Karel, estimées chacune 12 000 / 15 000 €. Bengt Lindström, avec six œuvres, est aussi très présent. Il faut noter aussi cinq œuvres de Jean Hélion, dont une particulièrement imposante : Suite machinale pluvieuse, venteuse, etc., estimée 25 000 / 30 000 €.
«Le geste, tu ne t’en lasses jamais» dit Depardieu. Les trois encres de Fernand Léger, dont le Portrait d’Arthur Rimbaud, estimé 15 000 / 20 000 € illustrent bien cette phrase. Et c’est toute une section de la vente qui est dédiée à l’abstraction lyrique, avec 22 tableaux, dont une huile sur toile de Gérard Schneider de 1947 estimée 25 000 / 30 000 €, plusieurs compositions à l’huile, à l’encre de chine et pastels d’Hans Hartung, une œuvre de Poliakoff, des toiles d'Olivier Debré et d’André Lanskoy.
« J’aime voir le trait » : le travail graphique d’Henri Michaux, dont 23 œuvres figurent à la vente, révèle une obsession pour les états altérés de la conscience, partant de taches pour arriver à une sorte de danse picturale. Cinq œuvres de Calder dont une gouache, L’Etoile, estimée 60 000 / 80 000 €, ainsi que quatre œuvres de Miro (un polyptyque, deux encres et une eau-forte acquises auprès de la Galerie Maeght) expriment parfaitement cet intérêt pour le trait. Il se retrouve aussi dans la géométrie cubiste des œuvres de Louis Marcoussis Nature morte de la mer (30 000 / 50 000 €) et d’Ossip Zadkine, Buste de femme la tête en arrière (50 000 / 80 000 €). Paradoxalement, la déstructuration des plans d’un collotype de Duchamp, Intérieur (50 000 / 60 000 €), crée une ambivalence entre le trait et le flou.
« Finalement, l'art, c'est ça. Ce n'est pas tellement de représenter, c'est simplement que ça vient de ce qui vous touche le plus fort. »
Gérard Depardieu s’impose aussi par son choix d’œuvres remarquables tel ce Vase de fleurs d’Odilon Redon, estimé 50 000 / 80 000 €, explosion colorée loin des scènes sombres et oniriques habituelles. Il trouve l’œuvre unique en son genre dans une production, qui surprend et séduit. Gérard Depardieu acquiert également cette Composition moins classique de Niki de Saint Phalle de 1959, estimée 50 000 / 80 000 €. Au gré de ses rencontres, il découvre des artistes, comme Bernard Quentin, dont plus d’une dizaine d’œuvres seront proposées aux enchères. C’est lui aussi qui réalise le décor de son hôtel particulier parisien. « Bernard, c’était une merveille lui. Je n’ai jamais vu un mec travailler autant. C’était un peu comme Calder. » Les voyages sont également l’occasion de révélations. C’est au Sénégal que Depardieu rencontre le sculpteur Ousmane Sow dont un bronze colossal, La Danseuse aux cheveux courts, est estimé 60 000 / 80 000 €. Au Caucase, sur les traces d’Alexandre Dumas qu’il a maintes fois joué, il se lie avec la famille de Maryam, qui transcrit sa perception du monde dans des toiles figuratives ou abstraites très colorées et lumineuses, estimées entre 1 500 et 6 000 €.
Odilon REDON (1840-1916) Vase de fleurs Huile sur panneau. Signée en bas à gauche. 26.5 x 21.5 cm 50 000 / 80 000 €
Mardi 26 septembre 2023 à 18h Mercredi 27 septembre 2023 à 14h Hôtel Drouot 9 rue Drouot - 75009 Paris
EXPOSITION PUBLIQUE
Samedi 23 septembre 2023 de 11h à 18h Lundi 25 septembre 2023 de 11h à 18h Mardi 26 septembre 2023 de 11h à 17h Hôtel Drouot 9 rue Drouot - 75009 Paris
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