Arthur RIMBAUD (1854-1891). L.A.S., Aden 28 septembre 1885, - Lot 199

Lot 199
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Arthur RIMBAUD (1854-1891). L.A.S., Aden 28 septembre 1885, - Lot 199
Arthur RIMBAUD (1854-1891). L.A.S., Aden 28 septembre 1885, à sa famille ; 3 pages petit in-8. Rare lettre de l’enfer d’Aden à sa famille. « Mes chers amis, Je reçois votre lettre de fin août. Je n’écrivais pas, parce que je ne savais si j’allais rester ici. Cela va se décider à la fin de ce mois, vous le voyez par le contrat ci joint, trois mois avant l’expiration duquel je dois prévenir. Je vous envoie ce contrat pour que vous puissiez le présenter en cas de réclamations militaires. Si je reste ici, mon nouveau contrat prendra [effet à partir] du 1er octobre, Je ferai peut-être encore ce contrat de 6 mois. Mais l’été prochain je ne le passerai plus ici, je l’espère. L’été finit ici vers le 15 octobre. Vous ne vous figurez pas du tout l’endroit. Il n’y a aucun arbre ici, même desséché, aucun brin d’herbe, aucune parcelle de terre, pas une goutte d’eau douce. Aden est un cratère de volcan éteint et comblé au fond par le sable de la mer. On n’y voit et on n’y touche donc absolument que des laves et du sable qui ne peuvent produire le plus mince végétal. Les environs sont un désert de sable absolument aride. Mais ici les parois du cratère empêchent l’air d’entrer, et nous rôtissons au fond de ce trou comme dans un four à chaux. Il faut être bien forcé de travailler pour son pain, pour s’employer dans des enfers pareils ! On n’a aucune société que les Bédouins du lieu, et on devient donc un imbécile total en peu d’années. Enfin il me suffirait de ramasser ici une somme qui placée ailleurs, me donnerait un intérêt sûr à peu près suffisant pour vivre. Malheureusement le change de la Roupie en francs à Bombay baisse tous les jours, l’argent se déprécie partout, le petit capital que j’ai (16000 fcs) perd de valeur, car il est en roupies, tout cela est abominable, des pays affreux et des affaires déplorables, ça empoisonne l’existence. La Roupie se comptait autrefois 2 frs 10 cents dans le commerce, elle n’a plus à présent que 1.90 de valeur ! Elle est tombée ainsi en 3 mois. Si la convention monétaire latine est resignée, la roupie remontera peut-être jusqu’à 2 francs. J’ai à présent 8000 roupies. Cette somme donnerait dans l’Inde, à 6% 480 Ries par an, avec laquelle on peut vivre. L’Inde est plus agréable que l’Arabie. Je pourrais aussi aller au Tonkin ; il doit bien y avoir quelques emplois là à présent. Et s’il n’y a rien, là, on peut pousser jusqu’au Canal de Panama, qui est encore loin de finir. Je voudrais bien envoyer en France cette somme, mais cela rapporte si peu ; si on achète du 4 ½ on perd l’intérêt de deux ans ; et du 3 % ça n’en vaut pas la peine. D’ailleurs au change actuel des Roupies, il faudrait toujours que j’attende, à présent on ne me donnerait pas plus de 1,90 pour paiement comptant en France. 10 % de perte, comme c’est agréable après 5 ans de travail ! Si je fais un nouveau contrat, je vous l’enverrai. Renvoyez moi celui-ci quand vous n’en aurez plus besoin Bien à vous Rimbaud ». Ancienne collection du Bourg de Bozas, bibliothèque du château de Prye (1990, n° 226). Correspondance (éd Lefrère), p. 431.
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